FAUT-IL SE SERVIR DE NOS BLESSURES POUR ÉCRIRE ?
Le lien entre l’écriture et la thérapie n’est plus à démontrer, je ne vais pas le faire ici. Mais écrire pour aller mieux est un acte solitaire à destination unipersonnelle : soi.
Je reçois trop souvent des manuscrits de personnes qui me hurlent leur douleur et leur souffrance. Attention, je ne me moque pas du tout en rapportant cela ; je constate seulement que c’est un fait croissant, comme celui de l’autofiction. Ces manuscrits, je les refuse systématiquement.
Nous sommes tous confrontés à nos douleurs et nos échecs (certains d’entre nous sont plus chargés, c’est indéniable). De ce fait, la douleur des autres ne nous est pas toujours recevable dans sa plus stricte nudité, c’est terrible mais c’est comme ça.
Cela étant, tous les écrivains se servent de leur vie, et de celles de leur entourage, pour écrire. C’est naturel et accessible. Bien entendu, ce ne sont pas les bonheurs de la vie qui font vendre, mais ses obstacles et ses passages à vide. En ce sens, on se sert de sa ou ses souffrances et on a raison.
Mais il faut être très prudent, ne virer ni vers le pathos, ni vers la victimisation, ni vers le constat de développement personnel (« j’ai vécu cela à cinq ans mais j’ai réussi grâce à un chemin à devenir aujourd’hui blabla »).
Les douleurs et absurdités que nous avons vécues doivent servir vos personnages ET (j’insiste !) l’intrigue. Elles doivent être le point de départ de décisions, de routes, d’actions, de suspense, et de quelques apprentissages bien sûr, mais surtout d’une construction identitaire.
En d’autres termes, il vous faut être clair sur ce que vous écrivez : un roman, pas une main courante. Ainsi, vous devez privilégier tout autant votre protagoniste que l’intrigue. Si vous entrez trop dans la douleur et la plainte, vous passez à côté de la vie même qui, par définition, se joue dans le mouvement et l’action.
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